Ou commence la liberté artistique et où finit-elle ! Grande question… éternelle… comme l'éternité et où la plupart des grands créateurs sont allés au charbon, parce qu'ils étaient en avance sur leurs contemporains. Si Voltaire a connu l'exil en Angleterre c'est en partie pour avoir défendu l'Islam et la liberté du culte contre les fanatiques de l'Eglise à son époque. Mais ce sont ses idées qui ont révolutionné le monde à partir de 1789 tout comme Montesquieu qui a aussi connu l'exil en Angleterre. A propos de ce dernier c'est bien lui qui a consacré à travers son « esprit des lois » le principe de la séparation des pouvoirs. Mais aujourd'hui, il faut peut être aller plus loin pour séparer « tous » les pouvoirs. Ce qui s'est passé à TV « Nesma » doit rappeler d'abord à son promoteur que la politique, l'argent et les Médias ne font pas bon ménage. On passe d'un pouvoir à un « surpouvoir » et là, il suffit d'un accident de parcours, d'une « mouche » iranienne pour payer la facture et la « fracture » au prix fort. Autre conséquence, il est plus urgent que jamais, de séparer le « suprême » pouvoir qu'est la politique de tous les autres pouvoirs y compris la religion et l'argent ! Quand on veut tout avoir on risque de tout perdre et surtout de tout polluer ! Il est incontestable et toutes les expériences historiques le prouvent que la religion qui arrive à contrôler toute la société finira par contrôler l'Etat et conduira fatalement au despotisme. Si Ben Ali a légitimé sa dictature par un appareil séculier et la manipulation de certains articles bien « terrestres » de la constitution de 1959, l'extrémisme religieux qui emporterait dans sa « ferveur » même, les mouvements islamistes les plus modérés et les plus ouverts à la construction démocratique et pluraliste, peut quant à lui embarquer le pays vers une nouvelle dictature cette fois au nom de Dieu ! Le Cheikh Abdelfattah Mourou l'un des fondateurs « d'Ennahdha » et que personne ne peut taxer d'anti-islamisme ou d'adversité envers l'Islam et les Musulmans, n'arrête pas de dire que le moment de vérité est bien là et qu'il faut appeler les choses par leurs noms ! Les mouvements islamistes qui se disent modérés, ouverts à la modernité, au rationalisme et qui se disent prêts à participer honnêtement et loyalement à la nouvelle construction démocratique et libérale de la Tunisie, doivent assumer leur rôle avec franchise et détermination au risque de « fâcher » leurs extrêmes. Il va falloir mordre dans le vif et accepter les bases mêmes de la démocratie libérale universelle qui sont la liberté intellectuelle et la liberté du culte. Faire semblant de ne pas voir la « Rue » ou de légitimer ses dépassements n'annonce rien de bon. Demain on brûlera les livres puis les théâtres, le Parlement… puis quoi encore… les cours de justice … les institutions et enfin l'Etat tout entier ! Dans un Etat de droit, seule la loi est habilité à dire ce qui est interdit et ce qui ne l'est pas. Si quelqu'un a subi un préjudice moral ou matériel il peut demander réparation à la justice qui appréciera. La « Rue » a toujours été une arme à double tranchant. Elle peut faire tomber des pouvoirs affaiblis ou état de sclérose avancée. Mais elle peut aussi être à l'origine d'une nouvelle dictature et trahir à nouveau tous les espoirs des Tunisiens d'après la Révolution. Dans cette période trouble où 62% des Tunisiennes et des Tunisiens ne savent pas pour qui voter, alors que nous sommes à moins d'une semaine du scrutin, je ne peux qu'avoir une pensée pour cette maman bien tunisienne qui déclarait à une radio locale : « Moi je voterai pour ceux qui protègeront la Tunisie ». Y a-t-il plus beau et plus noble programme que de protéger la Tunisie en ce moment de tous les extrémismes porteurs de discordes et de violences… Protéger la Tunisie de nos mères et grands-mères, modérée fraternelle, libre à l'état pur et naturel comme une source bienfaisante. En un mot un art de vivre qui irrigue les racines de cette terre bénie depuis plus de 3000 ans ! K.G