Un gouvernement légitime, qui travaille et qui se respecte dans un Etat de droit, n'a pas besoin de « manipuler » la rue ou mobiliser ses soutiens pour prouver sa bonne gouvernance et la réussite de ses programmes. Un bon gouvernement gouverne... et son bilan parle pour lui sans devoir jouer à la victime que l'opposition « harcèle » injustement et pour des intérêts sordides.
Seuls les régimes politiques défaillants ou en perte de vitesse à cause, justement, de leur manque de vision et de programmes capables de prendre en charge les problèmes et les exigences de la société et de répondre à ses aspirations et ses ambitions pour le bien-être et le changement, s'acharnent à trouver des « bouc-émissaires », des « ennemis de l'ombre », que les inconditionnels partisans en « foule » et en délire, doivent dénoncer et livrer à la vindicte populaire.
C'est le propre des dictatures et de l'absolutisme depuis la nuit des temps de masquer l'impuissance en fustigeant les « traîtres », les « contre-révolutionnaires », les « ennemis du peuple » et de la nation.
De Robespierre, à Staline, de Franco à Pinochet, de Milosevic à Bachar Al Assad, pour ne citer que les plus tristement célèbres, tous « Empereurs » charismatiques qui ont gouverné avec une main de fer, mais très peu d'intelligence, ont utilisé la technique de la mobilisation de la « Rue » pour éliminer leurs adversaires politiques et vivre en maîtres absolus possesseurs de leurs « royaumes » jusqu'à la mort ou jusqu'à ce qu'un nouveau Tsunami les emporte, parce que leurs peuples en ont eu ras-le-bol de leur incompétence, leur turpitude et leur arrogance excessive.
Pour compléter l'image, a-t-on vu un Président américain ou français, a-t-on vu un Roi anglais ou espagnol, a-t-on vu un Premier ministre hollandais, australien ou japonais, demander à ses partisans de faire une manifestation massive (Malyounia... encore un concept qui nous vient d'Orient... !) pour soutenir, légitimer son action politique et dénoncer ses adversaires !... Jamais !
Les seules fois où certains dirigeants, des démocraties universelles l'ont fait, c'est pour défendre leurs nations en temps de guerre ; ces types : Churchill, De Gaulle ou Eisenhower...
C'est dire que depuis l'antiquité Platon et Aristote ont mis en garde les dirigeants et la classe politique contre la manipulation des « foules » qui sont « irrationnelles », facilement fanatisées et guidées souvent par la passion au détriment de la raison et de l'intérêt général.
Idem pour Machiavel et idem pour Alexis de Tocqueville dans sa « démocratie en Amérique » où il appelle à développer les institutions et l'Etat de droit pour canaliser les débordements des foules et de la rue et d'assurer la paix sociale et le bien-êtrecollectif.
Malheureusement aujourd'hui, encore, même dans les pays du « Printemps arabe » on continue à jouer à ce jeu sinistre qui consiste à mobiliser et enflammer les foules qu'on flattera à souhait par les dénominatifs de « Chabab Atthawra » (la jeunesse de la Révolution), de « Awfiya Atthawra » (les fidèles de la Révolution) etc..., etc..., pour dénoncer des hommes politiques et opposants de grande envergure et dimension nationale, parce que tout simplement ils aspirent, comme les gouvernants en place au commandement politique de leur pays.
Ces méthodes qui nous rappellent tristement les mascarades « populaires » et plutôt théâtrales des Ben Ali, Moubarak, Kadhafi et Bachar Al Assad, ont tendance de plus en plus, à refaire surface. Elles dénotent sans aucun doute la fébrilité de ces nouveaux dirigeants qui commencent à prendre goût aux « illusions » du pouvoir et ont peur de le perdre alors qu'ils ont été il n'y a pas longtemps de grands militants pour la liberté et les droits de l'homme.
Faut-il rappeler à la classe dirigeante et politique tunisienne que la Démocratie véritable aux normes universelles, peut-être bénéfique pour tout le monde, l'alternance au pouvoir et finalement, la meilleure thérapie contre la sclérose politique. Et puis, après tout, « perdre » le pouvoir ne doit pas être perçu comme un châtiment ou un déshonneur.
C'est bien l'Imam Ali, compagnon et cousin du Prophète vénéré qui répétait à ses gouverneurs : « Law damat li ghaïrika... lama alat ilyak ». (Si le pouvoir avait duré pour les prédécesseurs... il ne serait pas arrivé jusqu'à toi !).
Eh... oui, le pouvoir ensorcelle et corrompt, il peut rendre fou, alors qu'au bout du compte, le génie politique c'est de penser à l'Histoire et à la postérité et comme le prescrit la sagesse : « Al mar-ou hadith baâdahou » (l'homme, c'est ce qu'on dit de lui, une fois... parti) ! A méditer par nos dirigeants zélés toutes catégories.
Si vous perdez le pouvoir, ce n'est pas la fin du monde... qui sait, vous serez même plus heureux... de vous promener dans la « Rue » pacifiée comme tout le monde !