«La HAICA et le Syndicat national des journalistes tunisiens, en partenariat avec la BBC Media Action, ont organisé hier un deuxième atelier visant à établir un guide des bonnes pratiques relatives au traitement médiatique lors des crises et plus particulièrement en cas d'actes terroristes. Un premier atelier avait été organisé en décembre dernier, à l'issue duquel une ébauche dudit document avait été écrite et transmise pour discussion à différentes parties, aussi bien du domaine journalistique que sécuritaire ou juridique. Le document en préparation est une sorte de recueil recensant des conseils pratiques et des recommandations à l'adresse de tout journaliste couvrant des événements sur le terrain. Il s'agit d'instaurer des règles professionnelles, éditoriales et déontologiques communes à tous sans toutefois porter atteinte à la liberté de presse ou museler les médias. Ce projet vient suite aux différentes fautes professionnelles commises par des journalistes, notamment lors de la couverture d'attentats terroristes et aux procès qui leur ont été intentés sur la base de la loi antiterroriste. L'un des exemples souvent cité désormais reste celui des journalistes de la télévision nationale, accusés d'apologie du terrorisme et de constitution d'une entente en rapport avec les infractions terroristes, suite à la diffusion d'une séquence jugée choquante tournée au domicile du jeune berger de Sidi Bouzid, impitoyablement décapité par des terroristes. Convoqués et entendus par la brigade antiterroriste en janvier dernier, ils risquent prochainement d'être lourdement sanctionnés, voire même d'écoper d'une peine de prison pouvant aller jusqu'à cinq ans de réclusion. Guerre d'ennemis Un procès, des chefs d'accusation et une potentielle condamnation en totale dérogation aux décrets lois 115 et 116 relatifs à la liberté de la presse et de la communication et donnant autorité exclusive à la HAICA de sanctionner les journalistes en cas de faute professionnelle. Un dépassement contesté par l'ensemble du secteur médiatique et fermement condamné par le SNJT et à sa tête son président Néji Bghouri qui, encore une fois, n'a pas mâché ses mots lors de son allocution d'hier. Il a déclaré à ce sujet : « La Tunisie est en guerre contre le terrorisme et les journalistes sont aux premiers rangs pour combattre ce fléau. Mais il ne faut pas, au nom de la lutte contre l'extrémisme, porter atteinte à la liberté de la presse et sacrifier le droit à l'information sur l'autel du risque terroriste. Nous remarquons malheureusement que les journalistes sont, depuis un bon moment, pris pour cibles par les autorités et broyés par cette machine à restreindre les libertés. Les journalistes sont aujourd'hui considérés comme des adversaires et non comme des alliés dans cette guerre contre le terrorisme. Les discours du chef du gouvernement et notamment le dernier en sont la preuve concrète. Le ministère de la Justice et le procureur de la République sont, eux aussi, partie prenante dans cette guerre déclarée contre les médias et les journalistes. A ce propos, le SNJT va très prochainement publier une liste des ennemis de la presse et je promets que nul ne sera épargné. » Le doyen a ensuite adressé un message aux journalistes, les invitant à respecter scrupuleusement la déontologie journalistique, à vérifier toute information avant sa diffusion et enfin à rester solidaires entre collègues. Il a ajouté : « Certes le phénomène du terrorisme est récent en Tunisie et nous sommes en train d'apprendre, au fur et à mesure, à traiter ces tristes événements avec professionnalisme. Malgré notre manque d'expérience, nous avons fait d'énormes progrès mais le chemin est encore long. Surtout, ne donnons pas l'occasion aux ennemis de la presse et de l'information de profiter de nos erreurs!»