Alors que le commerce électronique, la vente par correspondance ou la vente à domicile se développent, le magasin, l'échoppe et l'hypermarché, demeurent le symbole traditionnel du commerce pour le consommateur, cette façade, qui paraît simple à appréhender, cache pourtant un large éventail de possibilités d'organisation des relations entre fournisseurs, distributeurs et revendeurs. La franchise en est une parmi tant autres. L'accord de franchise est un contrat de distribution qui associe une entreprise, propriétaire d'une marque ou d'une enseigne, le franchiseur, à un ou plusieurs commerçants indépendants, les franchisés. En contrepartie d'une rémunération directe ou indirecte, le franchiseur met à la disposition du franchisé sa marque et/ou son enseigne, ses produits, son savoir-faire, une assistance technique, et son réseau. Force est de constater que les acteurs économiques tunisiens n'ont pas attendu cette loi pour découvrir la franchise, laquelle existait bien avant mais sous différentes formes et appellations (licences de marques, accords de partenariat, contrat d'assistance technique ...). Ceci nous amènera donc à nous intéresser, dans un premier temps, au cadre juridique de la franchise, puis dans un second temps, à nous livrer à la loi de la franchise, tant dans ses apports que dans ses lacunes au regard des attentes des opérateurs économiques et de l'importance économique que représente la franchise pour la Tunisie.
Le cadre juridique de la franchise
Cette loi qui était en gestation depuis quelques années intervient dans le cadre d'une réorganisation du commerce de distribution des biens et des services, qui fait suite aux demandes pressantes de nombreux acteurs économiques en termes de libéralisation de l'activité des grandes surfaces et d'ouvertures de commerces franchisés. C'est en Juillet 2009 que la franchise fut règlementée en Tunisie par une loi sur la modernisation du commerce qui pose les fondements du contrat de franchise et l'obligation pour le franchiseur de remettre à ses franchisés un document d'information précontractuel. Cette loi est complétée par le décret d'application de 2010 qui fixe les secteurs d'activité ouverts aux franchises étrangères et ceux qui nécessitent une autorisation préalable.
L'Article 14 de la Loi n° 2009-69 du 12 août 2009, relative au commerce de distribution, définit le rôle du contrat de franchise en précisant que ce dernier est un contrat par lequel le propriétaire d'une marque ou d'une enseigne commerciale accorde le droit de son exploitation à une personne physique ou morale dénommée franchisé, et ce, dans le but de procéder à la distribution de produits ou à la prestation de services moyennant une redevance. Le droit d'exploitation de la franchise comprend le transfert des connaissances acquises, le savoir faire et l'exploitation des droits de la propriété intellectuelle. Le Décret n° 2010-1501 du 21 juin 2010, vient fixer aussi les clauses minimales obligatoires des contrats de franchise ainsi que des données minimales du document d'information l'accompagnant et relatives au franchiseur et de son secteur d'activité. Contrairement aux enseignes nationales – autorisées à franchiser quel que soit leur secteur d'activité – seules les franchises étrangères se développant dans certains secteurs peuvent s'implanter dans le pays sans avoir besoin d'une autorisation préalable du Ministère du Commerce et de l'Artisanat. Parmi ces secteurs , on peut citer les suivants : ● Secteurs de distribution : Parfumerie, produits de beauté et cosmétique – Prêt-à-porter – Chaussures – Maroquinerie – Articles et chaussures de sport – Produits diététiques – Horlogerie – Articles de cadeaux – Lunetterie – Articles de ménage grand public – Meubles – Plantes d'intérieur et fleurs – Quincaillerie et articles sanitaires – Matériel électronique et informatique – Librairie – Biens d'équipement pour divers secteurs.
● Secteur touristique : Location de voitures – Aires de loisir – Gestion des hôtels.
● Secteur de la formation : Formation professionnelle.
● Autres activités économiques : Services de dépannage – Salons de coiffure de beauté et d'hygiène corporelle – Services de réparation et de maintenance (auto, électronique ... ) – Services d'appui à l'abandon du tabagisme – Services de soins dans les hôtels Thalasso thérapie
Une interdiction de principe de la franchise Il faut néanmoins enregistrer avec beaucoup de satisfaction l'arrivée de ce texte qui constitue l'acquis d'un processus commencé depuis les années 1990, l'acquis principal étant la reconnaissance juridique de la franchise.
Dépourvue de tout cadre ou définition juridique, la franchise n'était pas protégée en tant que telle par le Droit tunisien. Le cas le plus connu de tentative d'implantation d'une franchise est celui de la grande enseigne de restauration rapide McDonald. Cette enseigne multinationale d'origine américaine avait voulu s'implanter en Tunisie en contractant une franchise avec un partenaire tunisien, et ce, dans les années 1993-1995. Alors que le projet était à un stade avancé et que différents contrats avaient été signés entre les parties prenantes au projet, ces dernières se sont heurtées à un refus d'autorisation préalable du Ministère du Commerce et de l'Artisanat.
A la différence de McDonald qui n'a jamais pu voir le jour en Tunisie, l'enseigne américaine de restauration rapide Pizza Hut a existé durant une courte période. A la lumière de l'article 6 de la loi sur la concurrence précitée, il a été conclu un accord bilatéral entre le Gouvernement Tunisien et la société franchisée (d'origine saoudienne), et par lequel cette dernière s'engageait à réaliser des investissements dans le cadre d'un plan économique d'amélioration de certaines zones touristiques. A l'instar de McDonald, l'ouverture d'une franchise Pizza Hut s'est heurtée à une fin de non-recevoir de la part des autorités, traduisant de la part de ces dernières une certaine réticence ou frilosité vis-à-vis d'un mode de distribution importé de l'étranger et dont l'efficacité, les progrès économiques, et les retombées positives auprès des consommateurs ne sont plus à prouver.
Quick Tunisie envisage de s'implanter dans de nombreuses villes tunisiennes L'esprit des nouvelles lois consiste en la modernisation, la mise à niveau du secteur commercial et la garantie de l'équilibre entre les différents intervenants du secteur. Partant de là, le cas s'est récemment présenté. Le premier fastfood de la chaîne Quick en Tunisie ouvre ses portes à partir de 20 avril 2015 au centre commercial Carrefour à la Marsa.
Quick, principale enseigne d'origine européenne de Hamburger Restaurant, comptant 40 ans d'une histoire de goût qui a adapté le modèle de la restauration rapide américaine aux habitudes et aux goûts européens, est toujours la 1ère enseigne de restauration rapide hamburger en Belgique et au Luxembourg, et l'unique challenger en France. L'enseigne Quick qui avait déjà fait un essai sur les marchés marocain et algérien, envisage de s'implanter dans de nombreuses villes tunisiennes en faisant appel à des fournisseurs locaux pour l'approvisionnement. Cette première ouverture va marquer le début d'un développement soutenu de la marque en Tunisie. La stratégie de l'enseigne consiste à s'implanter dans tout le pays en centres commerciaux, en centre-ville et avec 16 ouvertures qui sont programmées en raison à 3 à 4 inaugurations annuelles. La franchise Quick Tunisie a opté pour un approvisionnement local avec des normes internationales. Ainsi les viandes, le fromage, les crudités et une grande partie des sauces seront fournis par des tunisiens sélectionnés d'après un cahier des charges établi par le franchiseur.