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Propriété intellectuelle et financement des entreprises
Publié dans L'expert le 17 - 04 - 2009

L'accès au crédit demeure vital pour les entreprises. Ce besoin perpétuel pousse d'ailleurs à mener une réflexion permanente sur les nouvelles pratiques répandues dans le monde et, éventuellement, à s'en inspirer afin d'enrichir le dispositif local. Effectivement, l'ouverture sur les pratiques internationales témoigne de l'existence de certaines nouveautés en la matière. Une des plus originales : le financement des entreprises par le biais de la propriété intellectuelle.
La question peut cependant se poser : qu'ont à voir ensemble la finance et la propriété intellectuelle ? La réponse en un seul mot : tout. Pour développer un nouveau produit, pour fabriquer le prototype du prochain gadget à la mode, pour payer les honoraires des spécialistes et les taxes officielles, il faut de l'argent. Ce qui est affligeant, c'est que le titulaire de droits de propriété intellectuelle n'est récompensé que si sa création permet de réaliser une opération rentable, tandis qu'autour de lui, tout les intervenants (banques, professionnels de la propriété intellectuelle, comptables, avocats, agences d'études de marché ou de publicité et offices de brevets et de marques) reçoivent une rémunération, que le projet fondé sur lesdits droits décroche la timbale ou sombre corps et biens. Il semble que c'est justement ce raisonnement qui rapproche les deux disciplines partageant désormais l'idée de risque.

En effet, le financement basé sur les éléments de la propriété intellectuelle, c'est-à-dire l'utilisation en garantie d'une créance de marques, dessins et modèles, brevets et droits d'auteur ou autres actifs intellectuels, suscite un intérêt croissant dans les milieux concernés. Un nombre grandissant d'entreprises, qu'elles soient des multinationales géantes ou des PME, fait des droits de propriété intellectuelle une source de crédit. En revanche, plusieurs institutions financières n'hésitent plus à réaliser des opérations dans lesquelles ces droits sont donnés en sûreté.

Reste à démontrer l'originalité des nouveaux montages. Car la relation entre la propriété intellectuelle et la finance n'est pas, en fait, tout à fait inédite. En réalité, les outils de financement classiques fondés sur la propriété intellectuelle, tels que les redevances générées par les licences et la vente directe de brevets ou de marques, datent depuis longtemps et sont largement connues. Toutefois, les entreprises ont, depuis peu, trouvé de nouvelles manières pour mobiliser des fonds à l'aide des droits de propriété intellectuelle qu'elles détiennent, dont l'une consiste à mettre ces droits aux enchères. Plusieurs fois par année, des maisons spécialisées dans ce domaine organisent des encans d'actifs incorporels à la criée et en ligne, offrant ainsi aux titulaires de droits une possibilité d'accès rapide à des liquidités et créant pour les acheteurs potentiels d'actifs immatériels un marché jusqu'alors inexistant. Dans cette même logique, nombreuses plates-formes d'échange de droits de propriété intellectuelle en ligne sont déjà actives.

Une autre manière de mettre à profit la valeur d'un actif de propriété intellectuelle est de l'utiliser comme garantie. Bien que les biens donnés en sûreté soient normalement des actifs corporels tels que des biens immobiliers, des équipements ou des stocks, l'apport de droits de propriété intellectuelle en garantie d'un prêt peut contribuer à augmenter le montant de celui-ci. Lorsque l'emprunteur engage ses brevets, ses marques ou ses oeuvres protégées par le droit d'auteur, la valeur des biens donnés en garantie croît, et avec elle, les chances d'obtenir le montant recherché.

Certaines banques utilisent aussi les actifs de propriété intellectuelle comme instrument de renforcement du crédit. Devant le nombre croissant d'opérations de financement qui sont ainsi appuyées par des droits de propriété intellectuelle et l'augmentation des sommes liées à la concession de licences de propriété intellectuelle, Wall Street et les marchés financiers du monde entier commençaient à manifester de l'intérêt.

A cet égard, l'hypothèque paraît être la forme de sûreté qui présente le moins de risques. Mais elle suppose, tout d'abord, la cession des droits de propriété intellectuelle au prêteur, puis la concession au débiteur d'une licence sur ces derniers. Cela constitue, en fait, un grand problème dans la mesure où le créancier devient titulaire des droits de propriété intellectuelle, sur lesquels il aura désormais la haute main, et que cela pourrait représenter un risque pour le fonctionnement de l'entreprise du débiteur, ainsi que pour les preneurs de sous-licences.

Par ailleurs, certains titulaires de droits de propriété intellectuelle font appel au mécanisme de la titrisation (devenu actuellement célèbre grâce à la dernière crise financière !), qui leur permet de mobiliser plus facilement les montants qui leur sont nécessaires, dans la mesure où il fournit une couverture adéquate aux créanciers. Les opérations de titrisation d'actifs de propriété intellectuelle sont naturellement plus courantes dans les industries du cinéma et du disque, mais elles se répandent maintenant aussi dans les secteurs de la biotechnologie et des logiciels. La titrisation est également une pratique bien connue dans le domaine des brevets vu que le caractère exclusif des droits attachés à ces titres permet de les considérer comme des actifs commerciaux.

Pour que ces nouveaux montages n'aient pas une allure purement théorique, il convient d'invoquer certaines opérations concrètes qui se sont déroulées sur le marché. Le fonds d'investissement privé Altitude Capital Partners a fait, en février 2007, dans DeepNines, un fournisseur de solutions de sécurité pour réseaux informatiques, un investissement dont la rémunération est assurée par les revenus de propriété intellectuelle de la société, en prenant en contrepartie les actifs de celle-ci. Altitude a aussi investi, en avril 2008, en partenariat avec Goldman Sachs & Co., 11 millions de dollars dans Intrinsity Inc., une société texane qui détient les droits de propriété intellectuelle d'une technologie utilisée dans la conception de coeurs de microprocesseurs.

Reste maintenant à savoir si la crise, qui a carrément bouleversé la sphère financière, va renforcer ou bien restreindre cette tendance. Pas de réponse immédiate. Si certains voient que la crise est tellement cruelle qu'elle va tout détruire, d'autres pensent, au contraire, que les crises économiques ont toujours crée des conjonctures favorables à la création et à l'innovation. Dans cette seconde vision, le financement basé sur les droits de propriété intellectuelle pourrait même s'avérer un facteur de réhabilitation du système financier.

En tout état de cause, les exemples précités prouvent que les droits de propriété intellectuelle ne constituent pas seulement des actifs de grande valeur, mais également une source importante de financement. Les actifs incorporels, et notamment les droits de propriété intellectuelle, peuvent accroître la valeur des entreprises, et le fait de savoir en apprécier l'importance permet à leurs dirigeants de prendre des décisions financières et commerciales plus informées. Une meilleure évaluation de ces actifs peut aussi faciliter les négociations avec les institutions bancaires et l'accès au crédit ou l'obtention d'un meilleur taux sur un prêt.

L'évaluation constitue ainsi un aspect essentiel du processus de financement des actifs de propriété intellectuelle. La titrisation du risque qui en découle nécessite, en effet, de savoir quelle est la valeur réelle de ces actifs au moment de l'opération. A vrai dire, les méthodes existantes d'évaluation de la propriété intellectuelle sont surtout efficaces pour des brevets et des marques d'importance, pris séparément. Jusqu'à présent, aucune ne se prête d'une manière indistincte à tous les actifs de propriété intellectuelle, quelle que soit leur importance. Mais il n'en reste pas moins que la détermination de leur valeur peut constituer une obligation, par exemple à des fins comptables ou fiscales.

Les plus récentes initiatives en la matière sont la création sur l'American Stock Exchange d'un indice boursier basé sur la valeur des droits de propriété intellectuelle des sociétés et un projet d'établissement, à Chicago, d'une bourse de la propriété intellectuelle visant à permettre aux investisseurs et aux entreprises de participer à une grande variété de produits financiers axés sur la propriété intellectuelle : introduction en bourse individuelle ou en partenariat de titres qualifiés, indices, contrats à terme et options de propriété intellectuelle, titres de créance adossés à des droits de propriété intellectuelle, introduction en bourse de sociétés disposant d'un portefeuille important de brevets, nouveaux produits indiciels fondés sur la propriété intellectuelle...etc. Mais, encore une fois, l'on se demande si la crise ne va pas chambarder tous ces projets ambitieux.

Se situant maintenant dans le contexte national, l'on ne tarde pas –pour être réaliste- à percevoir des obstacles de plusieurs ordres. Bien qu'il existe, en Tunisie, des PME innovantes en besoin de financement, on ne peut pas vraiment compter sur ses actifs de propriété intellectuelle et, d'une manière plus large, sur ses actifs incorporels. D'abord, Il faut souligner que la Tunisie, comme le plupart des pays d'ailleurs, ne dispose pas d'un cadre juridique approprié en ce qui concerne les opérations de financement d'actifs incorporels, et notamment de propriété intellectuelle. Certains juristes et universitaires ont été conscients de cette lacune « universelle » en quelque sorte. La question du financement de la propriété intellectuelle fait actuellement l'objet de travaux d'élaboration de politiques au niveau international. D'ailleurs, il semble qu'à tous les problèmes soulevés par ce type de financement, une réponse internationale est recherchée en priorité.

La Chambre de commerce international (CCI) a ainsi publié au chapitre B)V) de sa feuille de route en matière de propriété intellectuelle un tour d'horizon des actions entreprises, à ce propos, par le secteur privé et les gouvernements. Pour sa part, la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (Cnudci) a constitué en 2000 un groupe de travail chargé d'étudier la question des sûretés sur les biens personnels, et notamment les actifs incorporels. Ce groupe de travail a reçu pour mandat d'élaborer des recommandations en vue de la mise en place d'un régime juridique efficace pour les sûretés sur les biens faisant l'objet d'une activité commerciale et de recenser les questions à traiter, notamment la forme de l'instrument et la gamme exacte des biens pouvant servir de garantie.

La décision d'entreprendre des travaux sur le droit des sûretés a été prise pour répondre à un besoin, soit celui de disposer d'une législation efficace, permettant de lever les obstacles juridiques au crédit garanti et ayant, par conséquent, des incidences bénéfiques sur la disponibilité et le coût du crédit. La Cnudci a conclu ses travaux en 2007 par la publication un guide législatif dans lequel elle formule des recommandations pour un régime juridique uniforme sur les opérations garanties, couvrant également le financement des droits de propriété intellectuelle. Ce guide législatif doit être considéré dans le contexte des autres politiques précédemment élaborées par la Cnudci, dont notamment la Convention des Nations Unies sur la cession de créances dans le commerce international et la Loi type sur l'insolvabilité internationale.

Outre cette question du cadre législatif, il est très peu plausible que les banques tunisiennes soient prêtes à adhérer à ces schémas financiers avancées. La réticence de ces institutions à financer ou à prendre en garantie tout ce qui est incorporel n'étant pas un secret. Il faudrait donc avant tout disposer d'une connaissance profonde du domaine de la propriété intellectuelle, avoir confiance en la valeur des actifs de la propriété intellectuelle et croire au fait qu'ils pourraient rapporter énormément en termes de gains. Destinés en premier lieu à financer l'innovation, les SICARs, pour leur part, sont appelés à agir et à avoir ainsi l'honneur.

L'enjeu est très considérable. Le succès du financement de la propriété intellectuelle représente un progrès important sur la voie d'une économie fondée sur le savoir, un modèle que notre pays œuvre à édifier. Reste tout de même une condition préalable et évidente à tout ce qui précède. Il s'agit d'une priorité, voire une obligation, qui incombe et à nos entreprises et à nos compétences : innover.


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