On n'arrête pas de le dire: la contrefaçon est un fléau dur à abattre si professionnels et consommateurs ne mettent pas la main dans la main pour le contrer. Mais disons que la passivité du consommateur tunisien face à ce phénomène est aussi palpable. Il suffit pour cela de faire un tour du côté de Boumendil. Malgré les maintes campagnes engagées pour la sensibilisation aux méfaits des produits contrefaits, ils sont toujours sollicités par le consommateur tunisien. "Le problème est que la contrefaçon touche aussi bien les produits tunisiens que les produits étrangers. Ce qui est très grave pour la tenue du tissu industriel", nous indique M. Houssem Touiti, inspecteur à la cellule centrale de la contrefaçon, au sein de la direction générale des études économiques relevant du ministère du Commerce et de l'Artisanat. Depuis le 1er août 2009, cette direction organise une exposition dédiée à la présentation de produits contrefaits saisis lors d'opérations de contrôle effectués par les agents spécialisés. "Il s'agit d'une manifestation de sensibilisation adressée au public, aux professionnels et aux médias. Nous voulons sensibiliser le consommateur quant aux dangers de la contrefaçon de manière à le responsabiliser pour lutter contre ce fléau", nous affirme M. Touiti. Divers produits y sont exposés : des appareils électroménagers (Moulinex devient Moulinette, Philipps devient Phillibs), des produits cosmétiques (J'Adore devient T'Adore, Sunsilk devient Sunsulk), des produits alimentaires (la vache qui rit devient Magic Cow), des sacs Luis Vuitton contrefaits, des pulls Lacoste contrefaits, etc. Et les contrefacteurs ne manquent pas de moyens pour induire en erreur le consommateur. Ils peuvent copier majoritairement le produit et changer quelques détails que le consommateur peut outrepasser s'il ne fait pas attention. A titre d'exemple, il peut emprunter le logo d'une marque, reprendre toute la liste des ingrédients, inscrire même une adresse de l'usine, insérer un code à barres, etc. Plus loin encore, un produit GIF Filter exposé est transformé en GUF Filter avec le même emballage avec une légère nuance dans la couleur. L'emballage extérieur est le même avec le nom original du produit. Un détail qui peut mettre en erreur même les agents de douane. On peut aussi citer la marque Luis Vuitton qui n'est même pas commercialisée en Tunisie mais qu'on trouve dans les magasins tunisiens situés dans les circuits touristiques. Même les touristes peuvent tomber sous leur charme puisqu'ils sont vendus à des prix largement moins élevés que l'original. D'ailleurs, en juin dernier, la cours d'appel de Monastir a condamné une entreprise tunisienne de la région pour avoir exploité et commercialisé des produits contrefaits aux marques de l'appelante. "C'est pour cette raison que nous appelons le consommateur à ne pas se fier aux produits à bas prix vendus dans les marchés parallèles. Le consommateur devrait prendre conscience que le gain qu'il croit effectuer en achetant moins cher n'est en réalité qu'une perte puisque le produit contrefait a une durée de vie très limitée et qu'il n'a aucune garantie en cas de casse", précise M. Touiti. Depuis 2006, les autorités de contrôle ont effectué 25 mille visites de contrôle au cours desquelles 4,6 millions d'articles ont été saisis. Le nombre de procès verbaux d'infractions dressés est de 1.692. Durant cette période, 75 requêtes ont été traitées parmi 91 reçues. Au niveau des expositions, seuls quatre ont été organisées, inclus celle qui se déroule actuellement au siège de la direction générale des études économiques. Les trois autres ont été organisées en 2007 dans les foires internationales de Gabès, Monastir et Sousse. "Nous comptons poursuivre cette activité dans d'autres espaces qui seront plus proches du consommateur et de son lieu d'achat. Les grandes surfaces et les lieux d'exposition seront les plus privilégiés", souligne M. Touiti. Faire sortir le consommateur de sa passivité est donc l'objectif des autorités de contrôle économique. Il s'agit là un grand défi à relever puisqu'il semble que le consommateur tunisien n'ait pas encore conscience des enjeux du fléau sur l'économie du pays. La détérioration du tissu industriel national est liée inéluctablement à la tenue de l'emploi. Il y va de son bien et du bien du pays.