Fethi Laâyouni a été élu maire du Kram en 2018. Ses frasques réactionnaires et ses prises de positions empreintes d'un islamisme obscurantiste aux antipodes des valeurs républicaines n'ont pas empêché des citoyens à glisser un bulletin en sa faveur. Au contraire, le populisme dont il avait fait montre a su séduire une infime frange de la population subornée par les discours extrémistes. Depuis 2018, Laâyouni agit en maître absolu dans sa commune, profitant des pouvoirs qui lui ont échus pour imposer ses idéaux. Dernier « fait d'armes » en date, le maire islamiste a missionné des employés, recrutés après son élection, pour encercler les locaux de la radio Shems Fm. Des agents, selon le dirigeant syndicaliste Ghassen Klibi, qui n'ont rien à voir avec le travail municipal, exploités par le maire pour les sales besognes. Le décor est posé. Ces employés donc sont encouragés par leur patron à s'attaquer à un média, en menaçant de déverser des tonnes d'ordures et en haranguant les journalistes. Ils sont en colère parce que l'animateur Hamza Belloumi a évoqué, lors d'une émission, la fermeture d'un commerce dans la commune du Kram par du personnel municipal « en civil » en réaction aux critiques du propriétaire contre la municipalité. Fethi Laâyouni avait eu son droit de réponse au cours de l'émission, mais son ressentiment ne s'est, semble-t-il, pas tari. Comme il agit depuis un bon moment déjà dans l'impunité, il lui est paru possible d'envoyer de monter ses agents contre des journalistes et de se comporter en bandit. Liberté d'expression, liberté de la presse ? La bande n'en a cure. Il faut dire que les violences envers les médias, qui expriment des critiques envers des dirigeants politiques, ont le vent en poupe ces jours-ci. Mais Fethi Laâyouni a le chic, ou plutôt le culot, de dépasser toutes les limites, de piétiner la loi et les valeurs de la République.
Ce personnage, qui n'a eu de cesse de défier la civilité de l'Etat, a un parcours assez original. Il a opéré après la révolution, un retournement de veste réussi. D'avocat inféodé au RCD, il s'est reconverti en islamiste zélé qui veut faire régner la charia. Le maire se voit désormais en inquisiteur qui fera rétablir dans sa bourgade, et plus si possible, la parole divine quitte à ce qu'il viole les lois de l'Etat qu'il est censé représenter. C'est ainsi qu'à l'été 2018, il s'est opposé fermement aux lois de l'Etat en interdisant aux Tunisiennes d'épouser des non-musulmans. Il a fait acte de désobéissance puisque le gouvernement tunisien avait, un an auparavant, signé une circulaire annulant celle de 1973 qui interdisait ces mariages. Cela c'était fait sous l'impulsion de feu Béji Caïd Essebsi. Les Tunisiennes avaient obtenu le droit d'épouser l'homme de leur choix indépendamment de sa nationalité ou de sa religion. Sauf que Laâyouni ne le voyait pas de cet œil et a agi en dehors du cadre de l'Etat. Il exige la présentation d'un certificat de conversion à l'islam délivré par le mufti pour pouvoir se marier à une Tunisienne.
Dès le début de son investiture, il avait d'ailleurs annoncé la couleur en refusant aux parents de donner des noms non-arabes à leurs nouveau-nés. Impossible pour un parent de se présenter à la mairie pour enregistrer sa progéniture sous un nom qui ne soit pas d'origine arabo-musulmane. La note du maître des lieux était irrévocable.
A l'automne 2019, le maire décide de créer un fonds de la Zakat pour investir dans les services publics. Fethi Laâyouni disait que la constitution est claire et pousse à se conformer aux règles et aux préceptes de la charia islamique dont la Zakat. Il contourne un cadre juridique inexistant en invoquant le code des collectivités locales qui permet aux municipalités de créer des fonds spécifiques. Alors que sa décision a été vivement critiquée, le maire avait décidé alors envers et contre tous, de planter des pancartes pour promouvoir le fonds et indiquer aux citoyens où il se trouve. Et le maire voit grand parce qu'il envisage que cette mesure soit généralisée aux autres municipalités de la République en organisant des colloques dans ce sens.
A l'été 2020, Fethi Laâyouni s'est violemment attaqué au président de la République, Kais Saïed qui est allé faire la prière du vendredi au Kram, sans l'informer ( !). Le maire a carrément dit que le chef de l'Etat avait enfreint la constitution en négligeant tout le 7ème chapitre consacré à l'autorité locale et qu'il aurait dû l'informer de ce déplacement puisqu'il « se trouve sous son autorité de maire » ( !). Fallait-il se munir d'un visa pour pouvoir faire un tour au kram ? L'impertinence dont il a fait montre a eu pour réponse une autre visite du chef de l'Etat pour la deuxième semaine consécutive.
Fin 2020, l'avocat islamo-RCDiste force les locaux de la section Tunis-Nord de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH) et ordonne sa fermeture. Il accuse les membres de la section d'avoir abrité « des personnes exerçant des pratiques immorales dans les locaux » et invoque des signalements concernant l'ouverture nocturne des locaux pour commettre « des pratiques immorales ». Le maire endosse ainsi le rôle d'une police des mœurs en persécutant l'une des plus anciennes organisations de défense des droits humains en Tunisie. En matière de persécutions, Fethi Laâyouni est passé maître, c'est ainsi qu'en mars 2021, il déclare lors d'une émission de grande écoute que « les homosexuels ne peuvent habiter au Kram étant une ville conservatrice ». Pour le représentant de l'Etat, la place de ces personnes est « soit en prison, soit à l'hôpital ». Sans s'en cacher le maire persiste et signe en disant qu'il n'est pas normal de discuter des droits des homosexuels dans un pays musulman et qu'il est pour le recours au test anal. Plus récemment, en plein conflit israélo-palestinien, le maire du Kram surfe sur la vague de soutien en décrétant l'interdiction de la vente des produits israéliens dans sa commune. Pour ce faire, il entreprend des descentes à l'aide de ses agents en harcelant les pauvres commerçants. Il sillonne les étalages en traquant les produits où il y a des inscriptions en hébreux. De produits israéliens, il n'y en a point, il s'agit des traductions habituelles, mais Laâyouni a marqué son coup en publiant quelques photos. A lire également Fathi Laayouni déclare ouverte la chasse aux produits israéliens
Ennemie de la République, ennemi de la civilité de l'Etat, ennemi des libertés individuelles, de toutes les libertés, le maire de la commune du Kram sévit depuis des années dans l'impunité la plus totale. Jusqu'à quand ? A lire également Fathi Laâyouni : Les homosexuels ne peuvent pas habiter au Kram ! Fathi Laâyouni : Les anciens du RCD n'ont pas de place dans la vie politique Fathi Laâyouni gère la municipalité du Kram comme son propre empire Fathi Laâyouni a-t-il le droit d'exiger un certificat de conversion à l'islam ? Kaïs Saïed répond à Fathi Laâyouni à sa manière et se rend au Kram ! Fathi Laâyouni devient plus que jamais la risée du web