La formation de la femme rurale ne date pas d'hier. Elle remonte aux années 60, où l'Etat intervenait, à l'époque, pour en promouvoir la situation sociale, la repêcher de l'illettrisme et lui conférer les attributs rudimentaires d'une vie digne et décente. Jadis, embryonnaire, à la charge de l'Union nationale de la femme tunisienne (Unft), placé, ensuite, sous l'égide de ministère des Affaires sociales, le dispositif de formation de la jeune fille rurale n'était vraiment pas assez réfléchi et reconnu pour être en mesure de faire sortir cette catégorie vulnérable du carcan de la pauvreté et du repli sur soi, sans source de revenus aucune. Il fallait donc, comme l'a relevé M. Abdelhak Dhahak, directeur des centres de la jeune fille rurale, au sein de l'Agence tunisienne de la formation professionnelle (Atfp), repenser la donne et changer de stratégie pédagogique pour remettre la fille rurale à sa juste valeur, en tant qu'acteur agissant dans son milieu familial et sociétal, mais aussi comme partenaire actif dans l'œuvre du développement local et régional. A la fin des années 90, sous la tutelle de ministère de la Formation professionnelle, ce processus d'apprentissage a commencé à porter ses fruits, à travers la croissance des demandes et la multiplication des centres à une large échelle. Cette nouvelle politique de promotion et d'émancipation intervient, à la faveur d'une sollicitude présidentielle toute particulière manifestée à ce genre social, pour hisser cette population ciblée à un statut plus avancé, dans une société solidaire et équilibrée. Cet intérêt grandissant que le Chef de l'Etat accorde à la femme tunisienne, toutes catégories confondues, procède essentiellement d'une profonde conviction si partagée que la femme rurale mérite d'avoir la même chance que l'homme et que la formation professionnelle n'est plus l'apanage de ce dernier. Une formation résidentielle gratuite Ainsi, depuis l'avènement du Changement, ce système a connu, au fil des mois et des ans, une évolution remarquable, de fond en comble. Autant sur le plan qualitatif que quantitatif, ce secteur a pu franchir le cap, revêtant, outre sa vocation sociale, une autre dimension économique qui tire ses lettres de noblesse de l'essence du travail et d'intégration dans la vie active. En effet, la création d'un réseau de centres d'apprentissage destinés à la jeune fille rurale a sa raison d'être. L'objectif est de lui permettre de se libérer pour avancer et de s'ouvrir sur son environnement, loin de toutes formes d'exclusion et de marginalisation. Besoin d'emploi exige ! Aujourd'hui, le nombre des centres relevant de l'Atfp a atteint, selon M. Dhahak, quelque 14 centres répartis sur 13 gouvernorats, avec une capacité globale de 1.200 postes de formation. " Sans pour autant oublier que ces postulantes ont également toutes les possibilités d'accéder aux autres structures professionnelles dont dispose ladite agence à travers les différentes régions ", a-t-il encore ajouté. Il s'agit, somme toute, de 135 centres sectoriels qui leur sont aussi ouverts, pourvu qu'elles fassent preuve d'un niveau minimum d'enseignement de base. Qu'elle soit analphabète, déscolarisée ou ayant un niveau secondaire, la jeune fille rurale pourrait, ainsi, bénéficier d'une formation résidentielle gratuite — y compris l'hébergement et la restauration — basée sur un cursus d'apprentissage professionnel étalé sur un ou deux ans et sanctionné par divers diplômes, à savoir certificat de formation professionnelle (CFP), certificat de compétence (CC) ou celui d'aptitude professionnelle (CAP). Un éventail de spécialités à choisir pour acquérir un certain savoir-faire pour mieux savoir vivre. De la broderie traditionnelle à l'agriculture, en passant par la bijouterie, coupe et couture, pâtisserie, cuisine, tapisserie et bonneterie, la chance d'insertion est de taille. Autant de filières que l'orateur n'a pas manqué de considérer comme des petits métiers à forte employabilité dont la palme d'or revient aux secteurs de l'agriculture et de l'habillement, avec un taux d'intégration de presque 90 %. Certes, l'initiative privée en fait grande partie, compte tenu des spécificités régionales et la nature même du milieu qui favorise le travail à domicile et l'installation à son propre compte. Un esprit d'investissement et d'entrepreunariat nourri par une formation complémentaire intégrée de 60 heures (Cefe). "C'est là un mécanisme d'appui à tous les programmes du développement local ", souligne le directeur. Structures de proximité par excellence, les centres de la jeune fille rurale demeurent d'une vocation sociale, technique et économique, susceptibles de lui ouvrir de nouveaux horizons dans le monde qui l'entoure. Afin de leur conférer une nouvelle dynamique, certains centres feront, bientôt, l'objet de travaux de restructuration, en l'occurrence ceux de Bouhajla à Kairouan, Beni Khedèche à Médenine, Batro et Aïn Kettana à Nabeul. Un autre centre verra prochainement le jour à Thala dans le gouvernorat de Kasserine. Autre nouveauté à généraliser : introduction, depuis une année déjà, de la formation en alternance dans le centre de Beni Khedèche, à titre expérimental, lance M. Dhahak, en conclusion.