Dans un entretien qu'il a accordé à La Presse, le patron de l'équipe de Tunisie Henry Kasperczak évoque la campagne mondialiste qui attend ses hommes à partir du 9 octobre prochain, parle des chances de son équipe et insiste sur la nécessaire réconciliation entre le public sportif et la sélection représentative. Henry Kasperczak, tout d'abord, une question qui peut paraître banale: êtes-vous optimiste quant aux chances de qualification de la Tunisie au Mondial russe ? Je suis de nature optimiste. Aujourd'hui, je ne me pose pas vraiment la question. Ce que je sais, c'est que tous les quatre ans, toutes les sélections jouent pour se qualifier. Il faut partir sur la base que tout le monde part de zéro, avec des chances identiques. Regardez le désastre du Nigeria. Un pays de 188 millions d'habitants qui ne s'est pas qualifié pour la prochaine coupe d'Afrique des nations. Pourtant, il a pu démontrer toutes ses qualité aux derniers Jeux olympiques. Ici, on est un peu trop pessimiste. On n'arrête pas de critiquer, surtout l'équipe nationale. La chose est autrement plus compliquée qu'en ce qui concerne les clubs. On ménage un peu ceux-ci. Moi, je connais ma place. Mais on a besoin de supporters. Avant, lors de mon premier passage en Tunisie, c'était différent. Les relations Fédération-clubs sont devenues plus tendues. Et cela se répercute sur le soutien indispensable qui doit entourer la sélection représentative. Sans l'apport des supporters, on n'est rien. La Tunisie est néanmoins tenue par tout le monde comme étant le favori en puissance du groupe «A» ? Tout le monde a sa chance. Certes, notre poule est jouable, mais chaque sortie propose ses difficultés. La RDC et la Guinée possèdent de bons footballeurs assez redoutables. En 2015, quand j'entraînais le Mali, j'ai joué à la CAN de la Guinée Equatoriale contre la Guinée. J'ai le souvenir d'une formation de qualité qui nous a posé beaucoup de difficultés. La Libye sera particulièrement motivée par la perspective de croiser le fer avec son voisin. Au championnat d'Afrique des nations réservé aux joueurs locaux, elle s'est battue jusqu'au bout. Un derby n'est jamais facile. Sur le papier, nous sommes peut-être les favoris. Mais la seule réalité qui compté est celle du terrain. Quelles seront les clefs de la qualification au Mondial russe ? Tout comme nous l'avions fait en coupe d'Afrique des nations, il faudra faire le plein à domicile et grapiller quelques points dans nos déplacements. Le calendrier est quasiment fait sur mesure. Vous débutez et concluez votre parcours à domicile ... Oui, il est très intéressant de démarrer à domicile. Une première victoire d'entrée, il n'y a pas mieux pour montrer le chemin de la qualification. Nous terminons notre parcours chez nous, devant la Libye, c'est une bonne chose aussi. «Personne ne détient une baguette magique» Votre team vous semble-t-il en progrès? Oui, surtout au niveau mental. Car l'état d'esprit compte énormément. Il faut partir sur des principes. En football, chacun donne le maximum pour montrer qu'il mérite sa place dans le groupe. Et je pense que les meilleurs joueurs, ceux qui le méritent, sont là, avec nous. Ces progrès vous satisfont-ils suffisamment ? Vous savez, personne ne détient une baguette magique. En 1994, je débarque sur un désastre suite à la coupe d'Afrique des nations, à Tunis. J'ai dû trouver la solution et le dispositif adéquats. On n'est jamais parfait. Mais je dirais que nous sommes actuellement sur la bonne voie. Il faut néanmoins travailler dur. Cela dépend aussi des blessures, de l'état de forme, du «mariage» entre joueurs locaux et expatriés. On assiste à la percée des Ben Amor, Lahmar, Beguir, Khenissi. C'est une bonne chose, leur choix parait justifié. On verra s'ils vont pouvoir rester en forme. Le championnat est le championnat, que ce soit celui de Tunisie ou ailleurs. Il y a beaucoup de paramètres. Le mieux serait de juger après le match, et ne pas partir en conjectures. Le foot, c'est comme dans la vie, rien n'est facile. Il faut rester concentrés. Certains observateurs trouvent vos choix le plus souvent prudents, défensifs et frileux... Parmi tous les matches qu'on a fait, il y a eu deux seulement où nous n'avons pas marqué le moindre but: au Liberia (défaite 1-0), et au Togo (nul 0-0). C'est surtout à Monrovia que nous avons failli sur le plan offensif. Nous traversions alors une période difficile. Je crois qu'aujourd'hui, il serait injuste de m'accuser de défensivisme. Et puis, parfois, vous avez beau aligner six attaquants, à l'arrivée, vous n'inscrivez pas le moindre but. Le plus important, c'est la complémentarité, le collectif. Allez-vous disputer un match-test avant de croiser le fer avec la Guinée ? Avec quels joueurs voudriez-vous que nous disputions ce test. Les expatriés n'arriveront que dans la semaine du match. Aucune journée Fifa ne précède ce rendez-vous du 9 octobre. Nous allons nous rassembler comme d'habitude à Monastir une semaine avant le match. Enfin, Mohamed Methnani va-t-il pouvoir évoluer un jour en sélection ? Le joueur a vraiment envie de porter les couleurs de la Tunisie. Seulement, il doit composer avec une période difficile. Il ne dépend pas uniquement de lui de renforcer la sélection. S'il le fait, il aura des problèmes dans son club qatari où il sera dès lors versé dans le quota des joueurs étrangers. Actuellement, tant qu'il n'aura pas joué en sélection tunisienne, il continuera de bénéficier du statut de joueur local. Un jour, il viendra en équipe nationale, j'en suis certain. Il se tient toujours prêt. Bref, il y a des règlements contre lesquels on ne peut rien.