L'Organisation de défense du consommateur (ODC) a tiré la sonnette d'alarme lors d'une rencontre avec les journalistes sur la rareté grandissante et même la disparition des médicaments, mettant en cause la contrebande et la remise en cause du système de distribution basé sur les pharmacies. ‘'La rupture de médicaments que vit notre pays depuis des mois persiste, alors que certains malades peuvent décéder après 24 ou 48 heures sans leurs médicaments. Nous avons mené une enquête auprès de 16 gouvernorats pour constater la rupture. En vérité, nous assistons à une régression remarquable dans ce domaine et beaucoup de nos concitoyens ne cessent de nous interpeller pour nous confier leurs doléances à propos de la rareté ou de la disparition des médicaments, surtout pour les maladies chroniques'', confesse Slim Saâdallah, président de l'Organisation de défense du consommateur (ODC). Le constat est amer : un citoyen tunisien doit faire le tour de sept ou huit pharmacies avant de trouver le médicament qu'il lui faut. L'ODC a transmis cette information à toutes les parties impliquées : les ministères de la santé, du commence, des affaires sociales, pharmacie centrale, Cnss, Cnam, les Chambres professionnelles, INC... Aujourd'hui, nous les avons invités pour qu'ils nous parlent de leur responsabilité dans cette situation'', a-t-il, par ailleurs, ajouté lors de la dernière rencontre organisée avec les journalistes. Des prix multipliés par 4 ou 5 Selon l'enquête menée par l'ODC, pratiquement tous les grands groupes de maladies sont concernés par cette rupture : il s'agit des analgésiques, des anti-inflammatoires, des antibiotiques, des antibactériens et des traitements des classes thérapeutiques de l'endocrinologie, de la cardiologie, de la gynécologie et cardio-vasculaire, gynécologie et du diabète. Selon l'ODC, on voit ainsi au fil des gouvernorats un nombre grandissant de médicaments qui se font de plus en plus rares ou disparaissent purement et simplement. Des noms très connus de médicaments comme Warfarin, Zithromax, RhinoFlumucil, Janumet, Propranolol, Insulin, Augmentin, Doliprane, Triphasil, Nabodol, Azithromycin, Tahor, Acebutolol Almus, Glipizide, Indomethacin, Nordette, Argino, Apidra, Zithromax, Modilac, Jasmin... et la liste déjà longue ne cesse de s'allonger au fil des jours. Dans le détail, les choses sont encore plus délicates. Quand on parle ainsi de médicaments en rupture, il faut distinguer deux réalités :la rupture d'approvisionnement liée aux circuits de distribution entre le laboratoire et l'officine (le médicament est alors indisponible dans les pharmacies mais existe toujours chez le fabricant) et la rupture de stock liée à la fabrication du médicament (l'industrie est alors dans l'incapacité de fournir le traitement). Deux niveaux de rupture qui ne sont pas seuls en cause dans cette initiative de l'ODC de tirer la sonnette d'alarme car, de l'aveu de Slim Saadallah, les médicaments sont en train de passer à la contrebande où les prix augmentent et atteignent jusqu'à 4 ou 5 fois le prix initial et où la demande est de plus en plus forte, mettant ainsi en danger les ressources médicamenteuses destinées aux Tunisiens. Des produits nécessaires aux médecins L'ODC soutient que son enquête a également révélé que certains Tunisiens sont obligés d'aller de gouvernorat en gouvernorat pour trouver leurs médicaments et cette course s'ajoute à de nombreuses doléances. ‘'Beaucoup de plaintes nous sont parvenues de nos représentations dans les régions et notre organisation a pu saisir certaines des raisons derrière la rupture. Nous avons pu dresser une liste pour chaque gouvernorat et nous avons constaté qu'il existe des similitudes entre elles. L'absence de ces médicaments est rendue plus compliquée par la rareté grandissante d'une foule d'autres produits nécessaires au travail des médecins et mettant automatiquement en danger la vie des patients. De plus en plus de ces médicaments et produits ne peuvent être trouvés nulle part, même dans les policliniques de la CNSS'', explique-t-il. ‘'Nous avons deux systèmes qui ont toujours bien fonctionné, notamment les pharmacies, seules habilitées à distribuer les médicaments au public en s'appuyant sur les grossistes accrédités, et la Pharmacie centrale. Ce système est aujourd'hui en train de se déliter. C'est pour cela que nous avons invité toutes les parties concernées à s'exprimer et que nous invitons les médias à relayer ce danger qui s'est emparé de notre système de médication'', conclut le président de l'ODC.