Tous les participants à la CAN comptent sur leurs vedettes. Et les nôtres?! Nous autres journalistes avons parfois l'habitude de trop simplifier les choses : une équipe qui ne marche pas et nous nous empressons de tirer sur l'entraîneur. Nostra culpa. Nous avons en parallèle la fâcheuse tendance à être un peu trop indulgents avec les joueurs, les dirigeants et les supporters, alors que ceux-ci font partie intégrante de la vie et de la marche du club. Et quand un club ou une équipe nationale ne marche pas, c'est toujours l'entraîneur qui passe à la caisse. Responsable, mais pas trop... Il faut dire que c'est lui qui présente le produit final, soit l'équipe qui dispute la rencontre. Le stratégie et la tactique aussi. On peut même pousser le raisonnement pour dire qu'il est responsable du jeu qu'il essaie de mettre en place, à raison de dizaines de séances d'entraînement et d'applications en semaine. Mais il n'est pas responsable de tout le jeu car, une fois sa stratégie mise en place, une fois son onze de départ annoncé, ce sont les joueurs qui deviennent responsables du jeu et des résultats. Tout au plus s'il peut gueuler sur le banc ou faire du coaching comme certains aiment à dire et à en faire une science occulte. Alors que le coaching n'est qu'une simple lecture du jeu (pour laquelle il est grassement payé) et une chirurgie de réparation qui ne réussit pas à tous les coups. Puisque l'entraîneur ne fait que proposer, et c'est toujours le joueur qui dispose. D'ailleurs, le joueur aussi est grassement payé pour disposer. Sauf qu'il ne le fait pas toujours et c'est l'entraîneur qui en paye les frais. Comme les joueurs, les entraîneurs sont différents. Il y a les discrets et les grandes gueules. Un exemple de cette seconde race? José Mourinho. Il veut que tout lui revienne. Son mérite et celui de ses joueurs. Un peu moins le reste. Mais on ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre. A un moment ou un autre, ça finit toujours par casser. Voici un petit aperçu de comment les choses marchent, de comment elles doivent marcher et comment elles ne marchent pas du tout. Aujourd'hui, par exemple, le sélectionneur national est un peu dans l'œil du cyclone. Pour certains de ses choix et pour sa défense flottante essentiellement. C'est tant mieux ainsi, car le patron c'est lui. Mais il n'y a pas que lui et tout le monde doit assumer aujourd'hui. Des dirigeants aux... joueurs. Les premiers pour aider Sami Trabelsi à rétablir l'ordre (si désordre il y a; à ce propos, les dirigeants ont bien fait de réagir sur les écarts du médecin et du kiné, mais sans pour autant expliquer cela aux journalistes), on attend à présent des joueurs qu'ils fassent leur part. Affublés pour la plupart du statut de vedette, ils doivent justifier ce statut d'autant que cette équipe de Tunisie n'a rien à envier aux autres participants à la CAN. Les Drogba, Adebayor, Asamoah, Yaya Touré et, avant eux, les Abedi, Weah, etc., ont toujours donné le meilleur d'eux-mêmes, à la CAN. Il est temps que les nôtres en fassent de même d'autant que, déjà professionnels à l'étranger ou pas, la CAN demeure une vitrine exceptionnelle pour les joueurs qui aspirent à un statut meilleur. Alors, quand on voit les Dhaouadi, Msakni, Darragi, Abdennour et Mathlouthi passer un peu à côté en ce moment, il y a de quoi être très remontés contre eux... Abdennour est l'un des meilleurs défenseurs au monde en ce moment et il est bon qu'il le prouve sur le terrain, même si Sami Trabelsi n'a pas encore trouvé la meilleure formule à l'axe de son arrière-garde. Une carrière à relancer Star incontestée de notre compétition, Youssef Msakni est en baisse constante depuis un bon bout de temps. C'est vrai qu'il avait la tête ailleurs; c'est vrai qu'il était lessivé par trop de matches disputés et presque pas de repos; c'est vrai qu'il a été opéré, mais il n'en est pas moins vrai que sa longue méforme inquiète. Et aujourd'hui qu'il a l'esprit dégagé avec son départ à Lakhwya à Qatar (quel gâchis!) on attend de lui qu'il soit l'un des grands protagonistes de la CAN et qu'il apporte le véritable plus à l'équipe nationale. Idem pour Dhaouadi, rentré bredouille au Club Africain après ne pas s'être imposé dans un club aussi modeste qu'Evian, qui pouvait de surcroît être un tremplin pour des objectifs plus ambitieux (mais nous avons perdu depuis longtemps tout espoir de voir ce rêve se réaliser pour nos joueurs qui partent à l'étranger). Aujourd'hui, Dhaouadi fait son retour au Club Africain, au pays et à ses conditions. Plus aucune excuse pour qu'il ne se défonce pas à la CAN et pour qu'il ne redevienne pas le joueur virevoltant et créatif à la gauche de l'attaque tunisienne. Darragi lui aussi est parti, comme il a voulu. Depuis, il est perdu de vue et le Picasso n'a plus peint une seule toile digne de ce nom. L'artiste et le buteur providentiels ont cédé depuis un bon bout de temps déjà la place à un joueur au jeu incolore et inodore. Oussama doit justifier sa convocation (sinon Sami Trabelsi aurait commis une grosse erreur) et relancer sa carrière à l'occasion de cette joute. S'il passe à côté, ses horizons sportifs seront très sombres et il finira, comme la plupart de ses compagnons, à retourner sportivement bredouille au pays. Venons-en au poste de gardien. Mathlouthi était un point de repère important et pratiquement incontournable. Il ne l'est plus. Il sent de plus en plus fort le souffle de Ben Chérifia dans son dos. Il a tout intérêt à retrouver son meilleur niveau. Pour l'équipe, mais aussi pour lui-même, car si Ben Chérifia devait s'installer dans la cage, ce n'est pas pour la quitter de sitôt. Et derrière, il y a encore Ben Mustapha... Vedettes dans les seuls médias tunisiens, les nôtres sont aujourd'hui dans une épreuve de vérité grandeur nature. La CAN, ce n'est pas pour les fantoches !