Dans l'absolu, toutes les hypothèses sont possibles aujourd'hui, en ce contexte de blocage... Reprise du dialogue entre les protagonistes politiques pour parvenir à un compromis mais aussi retour à la rue et à ses slogans... Ces derniers jours, on observe cependant comme un glissement dans le paysage sonore des protestations. Les trublions et les agitateurs, si l'on ose dire, se font de plus en plus entendre à l'intérieur des murs de l'ANC... A la suite du discours de Ben Jaâfar, mercredi soir, certains «légitimistes» ont appelé à se passer de l'actuel président de l'Assemblée constituante, de passer outre sa mesure de suspension des travaux, voire de le congédier... Du côté d'Ennahdha, on se veut plus mesuré : le président du bloc parlementaire du parti majoritaire, Sahbi Atig, a jugé «positive» la décision de Ben Jaâfar d'appeler à une réunion du bureau de l'ANC la semaine prochaine. Cependant, il fait savoir à qui veut l'entendre que ce n'est pas assez, et qu'il faut un calendrier clair concernant la période à venir... Ce vent de fronde n'est pas nouveau mais prend de l'ampleur, semble-t-il. On y perçoit aussi des critiques récurrentes contre le processus de dialogue chapeauté par le quartet : processus qui marginalise l'ANC et réduit son autorité en tant que structure bénéficiant de la légitimité électorale... Les partisans de la poursuite du dialogue se trouvent donc pris entre deux feux : les jusqu'auboutistes de l'opposition qui rêvent de faire plier la Troïka et qui voient peut-être dans le rendez-vous de demain une occasion à ne pas rater et, d'autre part, une frange des députés légitimistes qui voient dans les partis de la Troïka favorables au dialogue des traîtres à la cause de la légitimité électorale. La journée de demain va nous dire très certainement pour quelle option penche la rue... Et cela, non pas tant par la masse des gens qui vont se rassembler à l'occasion du 40e jour de la mort du député Mohamed Brahmi, mais surtout par le ton général des manifestants et de leurs slogans... Beaucoup de citoyens, même proches de l'opposition, en viennent à penser qu'un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès... Entendons que la poursuite de la crise. Surtout que celle-ci, de l'avis même des parrains du dialogue, est en train de faire un tort considérable à l'économie du pays : ce que les indicateurs et les appréciations des agences internationales de notation ne cessent de faire ressortir ces derniers temps. S'agissant des parrains en question, ils ont actuellement suspendu leur mission de médiation. Mais ils n'ont pas fermé l'accès à une reprise du dialogue. Hier, dans une déclaration, Houcine Abassi, secrétaire général de l'Ugtt, a indiqué seulement qu'il attendait de la Troïka au pouvoir des «signaux positifs»... D'une façon générale, la position de la centrale syndicale demeure d'amener les différents protagonistes à un consensus «dans l'intérêt du peuple tunisien», comme l'exprime pour sa part le secrétaire général adjoint, Belgacem Ayari, dans une déclaration à la TAP... A un moment, donc, où les partis regroupés au sein du Front du salut sonnent le rappel des troupes, l'appel au dialogue reste à l'ordre du jour. Non seulement cela, mais il est question aussi d'introduire dans le dialogue en question une nouveauté, à savoir que les parrains que sont l'Ugtt, l'Utica, la Ltdh et l'Ordre des avocats pourraient cesser de faire la navette entre les protagonistes du dialogue pour entamer une nouvelle phase, celle du face-à-face accompagné...