Le trentième anniversaire de la mort de Hédi Jouini, le grand chanteur tunisien, compositeur et virtuose du luth est passé inaperçu. Aucun hommage, aucun mot d'aucune partie étatique ou privée n'avait émané pour rappeler à toutes les générations, non pas seulement de cette date, mais de l'apport très considérable de feu Hédi Jouini pour la chanson tunisienne sous toutes ses formes et genres. Celui qui fut surnommé « Le zazou de Bab Jedid » est parti à jamais le 30 novembre 1990, à 81 ans. Il était né le 1er novembre 1909. Son riche répertoire l'a immortalisé avec des centaines de chansons qu'il avait interprété lui-même qui s'ajoutent à d'autres centaines de chansons qu'il avait composé pour ses pairs. Il en est même des œuvres qui avaient été enregistrées par plusieurs voix comme : « Mektoub » sur des paroles d'Abderrazzek Karabaka, Lamouni illi gharou minni », qu'il avait écrite avec l'artiste libyen Béchir Fehmi (Alias Béchir F'hima), « Taht el yasmina fillil », « Ya azizet errouh » dont il avait écrit les paroles, les plus célèbres de son répertoire. Il avait composé pour la grande chanteuse Warda, (Al anissa Warda), à ses débuts : « Ach ingoul ach ingoullak. » Hédi Jouini avait eu un grand penchant envers la musique dès son plus jeune âge. Il fréquentera la « Rachidia » pour quelque temps, mais ne tarda pas à intégrer le milieu artistique en chantant dans des concerts publics. Il fut également l'un des membres de la troupe qui avait accompagné Ali Riahi lors de son premier concert public en 1936 au Palais des Sociétés Françaises, l'actuelle Maison de la culture Ibn Rachik. Hédi Jouini avait fait partie du cénacle de « Taht Essour » là où se réunissaient dans un café en ce lieu de Bab Souika ceux qui seront les précurseurs du renouveau de la chanson, de la poésie, de la littérature, du journalisme particulièrement la presse littéraire et satirique, de la chanson satirique en Tunisie dans les années 30-40 du siècle dernier. Ce passage lui avait fait rencontrer les poètes : Abderrazzek Karabaka, Mahmoud Bourguiba, Mohamed Laribi, Hédi Laabidi, Ali Douaji qui lui proposera les paroles du « Daour » : El Itab », Ahmed Kheireddine, Beiram Ettounsi qui lui avait écrit le « Daour » : « Aatifi addel kawamek » et Jaleleddine Naccache, sans omettre les journalistes : Abdelaziz Laroui, Mohamed Ben Fedhila et Zinelabidine Senoussi. Mais Hédi Jouini, c'est fait distinguer par ses chansons composées dans le genre du Flamenco. A les entendre, on relève l'engouement de Hédi Jouini pour cette musique et sa maîtrise de ce genre de chanson qu'il avait su adapter aux modes tunisiens et « Charki. » On se rappelle qu'au début des années soixante dix, et lors de sa visite en Tunisie dans le cadre du festival de Carthage, la danseuse de Flamenco Lucero Tena et jouant des castagnettes, avait accompagné Hédi Jouini qui interprétait « Mektoub. » Un moment d'anthologie enregistré dans les studios de la Télévision Tunisienne. Paix à l'âme de Hédi Jouini !