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« Au moment opportun, un projet politique rassembleur verra le jour »
Entretien avec… Marouen Felfel, député, membre du bureau de la Coalition Nationale
Publié dans La Presse de Tunisie le 20 - 10 - 2018

Originaire de Nabeul, une ville qu'il affectionne particulièrement bien qu'il vive et travaille en France, Marouen Felfel a fait ses études à l'Ihec avant de les poursuivre en France puis aux Etats-Unis, où il obtient un MBA à la Wake Forest University en Caroline de Nord. Jeune député de 33 ans, Marouen Felfel a d'abord mené campagne pour Nida Tounès, sans obtenir un siège, mais il rejoindra par la suite l'ARP, lorsque Khaled Chaouket est propulsé ministre. Il sera l'un des fondateurs de Machrou Tounès, mais déçu par le manque de cohérence et de concertation au sein du parti, il le quitte avec quatre autres élus. Aujourd'hui, ce jeune parlementaire qui représente les Tunisiens de France s'inscrit dans une nouvelle aventure politique, celle de la Coalition nationale. Son rêve : réunir la famille centriste et progressiste sous la bannière d'un grand parti, mais, surtout, éviter «les erreurs de Nida Tounès».
On a décrit la Coalition nationale comme étant un groupe d'élus matures, riches en expériences, ce qui serait un gage de solidité du groupe; pourtant, on assiste très rapidement à des défections, que s‘est-il passé ?
L'adhésion au groupe était basée sur un engagement personnel. Ce n'était pas une fusion de partis ou de bloc. Elle passe par la signature d'une charte qui englobe un certain nombre d'engagements. Ceux qui se sont engagés avec nous n'étaient pas sur un compromis politique, mais sur un engagement sur un certain nombre de valeurs énumérées par la charte. Il est décevant de voir des députés qui ont signé une charte d'adhésion se rétracter en 24 heures seulement. En 24 heures, ils ont changé de convictions.
Mais dans cette charte, il n'a jamais été question d'un projet politique ou d'un parti politique ?
Le groupe parlementaire peut aujourd'hui participer à une dynamique de projet politique, mais ce n'est pas la mission ultime ou exclusive de ce groupe. La Coalition nationale a pour objectif d'accélérer le travail législatif. Notre travail est d'essayer de changer la perception générale que l'opinion publique a du travail parlementaire. Nous essayons de rétablir la confiance perdue. C'est donc parti d'une prise de conscience générale et d'une volonté de se rattraper. L'idée était également de rassembler la famille centriste et moderniste, déçue par l'effondrement de Nida Tounès. Concernant le projet politique, vous convenez qu'on ne peut empêcher des députés appartenant à la Coalition nationale de réfléchir à la création d'un projet politique, ce n'est pas du tout un crime dont on devrait rougir. C'est d'autant plus vrai que c'est un besoin et un souhait d'une large frange de la famille moderniste, que de se rassembler autour d'un grand projet politique.
Est-ce qu'un projet politique existe? Ou est-ce que vous vous orientez vers un projet ?
Clairement, vu l'état actuel de l'ancien parti Nida Tounès et la déception d'une grande partie de la famille centriste et progressiste, je crois personnellement que la solution est la création d'un nouveau projet politique rassembleur, qui dépasse les erreurs qui ont pu être commises auparavant. Ces erreurs qui ont fait de Nida Tounès un parti qui est l'ombre de lui-même, incarnant désormais toute la déception de notre grande famille. Cette grande famille centriste moderniste, réformatrice, mérite un autre grand projet, ouvert à toutes les tendances. Ce n'est pas exclusivement une initiative des députés, ce projet doit s'inscrire dans une logique inclusive. Au moment opportun, le projet se transformera en un parti politique ou un grand mouvement.
Pourra-t-il être prêt pour 2019 ?
Nous n'avons plus le choix, nous ne pouvons plus nous permettre d'attendre encore. Pour le bien de la Tunisie, pour son intérêt, pour l'intérêt de l'équilibre politique et la stabilité, nous ne pouvons plus nous permettre d'aller éparpillés aux élections de 2019. Il faut que cette grande famille y aille rassemblée sous la bannière d'un grand projet politique, fidèle à ses valeurs.
Et l'économie dans tout cela ? C'est un peu la politique politicienne qui prend le dessus.
La situation économique et sociale est sous tension. Il ne faut cependant pas oublier qu'en 2018, nous avons au moins réussi à maintenir les équilibres budgétaires et financiers, nous avons essayé de maîtriser le déficit commercial, et nous avons réussi à maîtriser la dette extérieure. Il faut également saluer le fait que la loi de finances complémentaire ne fait pas appel à de nouvelles ressources, il s'agit d'un réajustement. Ce que nous avons gagné en revenus fiscaux a été consommé par la hausse de la facture énergétique. Il y a des indicateurs positifs qui ne sont pas palpables malheureusement. Aujourd'hui, ce qui nous empêche de réaliser des performances économiques avec un impact plus direct, ce sont les facteurs liés principalement à la facture énergétique, donc un facteur exogène. Mais il y a également une raison endogène, celle de l'amateurisme et de l'inexpérience de Nida Tounès qui a mené aujourd'hui le pays dans une crise politique qui a fini par aggraver la situation.
Dans un pays qui veut se rétablir, nous avons besoin d'une stabilité politique, et c'est ce que nous défendons. Malheureusement, ce qui reste de Nida Tounès a été aveuglé par une volonté de limoger à tout prix le chef du gouvernement. Cette crise politique a freiné le gouvernement dans son élan réformateur. Nida Tounès constitue la majorité de ce gouvernement, et pourtant, au lieu de soutenir le gouvernement, il n'a cessé de le critiquer. Il a créé une crise artificielle. Je rappelle que l'échec de Nida Tounès aux élections municipales a été dissimulé par la montée au créneau de Hafedh Caïd Essebsi qui demandait le départ du chef du gouvernement. Il a exporté la crise du parti au gouvernement, et c'est ce que j'appelle de l'amateurisme.
Vous êtes jeune, et vous représentez les Tunisiens en France et aujourd'hui, des milliers de jeunes Tunisiens compétents et diplômés n'ont qu'un rêve, celui de quitter la Tunisie, que peut-on faire pour les retenir ?
Nous sommes d'accord sur ce constat. La situation actuelle fait que la Tunisie ne fait plus rêver une grande partie de la jeunesse, mais j'inscris également ce phénomène dans le cadre d'un phénomène mondial, celui de la mobilité des compétences. Aujourd'hui, on ne se pose pas de questions lorsqu'un Européen part aux Etats-Unis pour y travailler.
Revenons à la situation ressentie par les Tunisiens, j'ai vu une grande vague de départs des compétences, notamment parmi ceux qu'on croyait à l'abri de la tentation de partir, tels que les médecins. Cela, à mon avis, est dû au retard dans la mise en œuvre des réformes structurelles. La réforme de l'éducation, la réforme de la santé et la réforme de la fonction publique. Le deuxième volet, c'est également celui de la réforme de la haute fonction publique. Les hautes fonctions n'attirent plus les compétences. A cela s'ajoute le délabrement du secteur des transports et l'éducation qui sont des déterminants essentiels pour l'évaluation de la qualité de la vie.
Pour jeter les bases de ces réformes, il faut assurer une stabilité politique, nous ne pouvons plus continuer comme cela. Il faut une révolution réformatrice. Il faut que l'Etat reprenne sa capacité à faire respecter la loi et à faire appliquer les réformes. Le corporatisme a eu un impact très néfaste sur la qualité de la vie. Le coût des réformes est assez important, alors autant commencer tout de suite.
Est-ce que la faiblesse des IDE a eu un impact aussi sur la fuite de nos compétences ?
Il y a des signaux importants pour le retour des IDE, mais il faudra déployer plus d'efforts pour que la Tunisie retrouve son attractivité en termes d'investissements. Nous étions comparables au Maroc en termes d'IDE; aujourd'hui, le Maroc attire le double de ce que nous attirons.
Il faut aussi dire les choses comme elles sont. Les mouvements sociaux et l'instabilité politique sont deux facteurs qui ont permis à d'autres destinations de capter les IDE, mais je reste persuadé que la Tunisie possède toutes les qualités intrinsèques pour retrouver rapidement un meilleur niveau d'investissement.
Pensez-vous que l'Ugtt a pris un volume politique qui n'est peut être pas le sien ?
Je condamne l'anarchosyndicalisme et je défends le droit syndical. Ce qui s'est passé à la CTN l'été dernier, ou encore la situation de Tunisair, ont été perçus d'un très mauvais œil, notamment par les Tunisiens résidant à l'étranger. J'accuse l'anarchosyndicalisme d'être derrière le déclin de ces deux compagnies publiques, joyaux de la Tunisie. J'espère que l'Ugtt ne cautionne pas ces comportements.
Par ailleurs, je dois admettre que l'Ugtt a de tout temps joué un rôle politique. Ce rôle était important avant la révolution, car c'était une alternative à l'action politique. Aujourd'hui, j'invite tous ceux qui souhaitent jouer un rôle politique à le faire dans le cadre des élections de 2019. Il faut cesser ce mélange des genres.
L'émiettement politique engendré par le code électoral n'est-il pas lui aussi l'une des principales causes du statu quo ?
Il y a aujourd'hui une proposition d'amendement du code électoral qui sera discuté au parlement. La proposition ne résout cependant pas totalement le problème. Une démocratie fonctionne très bien lorsqu'il y a à la fois une majorité forte et une opposition forte. Le code actuel ne permet pas d'obtenir une majorité. En 2011, l'idée était d'assurer la présence à la Constituante de toutes les sensibilités et de toutes les tendances, même minoritaires.
Garder le code électoral destiné initialement à l'Assemblée constituante était une erreur. Nous nous retrouvons aujourd'hui dans une situation où tout le monde est présent mais personne ne gouverne. La réforme du code électoral est une des deux clés de la réforme de la vie politique. La deuxième clé est celle du financement public des partis pour éviter l'ingérence de forces externes ou des lobbys.
Justement, au regard des sondages publiés, les Tunisiens semblent n'accorder que très peu de confiance en ce système politique. Il y a un sentiment général du "tous pourris".
Je suis un fervent défenseur d'une initiative pour la moralisation de la vie politique. Je crois que nous sommes sur le bon chemin. Les dérapages que nous avons connus en cette période transitoire vont se dissiper peu à peu, grâce à l'arsenal juridique et judiciaire qui est mis en place.
En tant que jeune député, cela me désole de constater cette perception très négative du politique. Je crois qu'il y a un grand travail en matière de lutte contre la corruption. Les responsabilités politiques ne doivent plus être des certificats d'impunité. Et là, c'est aussi l'objectif de ce grand projet politique que nous souhaitons porter. La collusion entre la politique et la corruption, nous l'avons vue avec l'affaire Chafik Jarraya. Malheureusement, cette affaire est restée au niveau des hommes d'affaires et n'a pas été élargie à certaines complicités dans le monde politique. Sans moralisation de la vie politique, la démocratie tunisienne restera fragile.
Aujourd'hui, deux piliers de la démocratie restent faibles: les médias et la justice, cela ne contribue-t-il pas à la fragilisation de la démocratie naissante ?
Je suis un fervent défenseur de l'autorégulation. Nous avons défendu l'indépendance des médias et de la justice. C'est la responsabilité des journalistes et des magistrats de mener la réforme. C'est leur responsabilité. Je déconseille d'ailleurs aux politiques d'intervenir dans le domaine des médias et dans le domaine de la justice. Notre rôle est de donner à chacun des deux corps les moyens pour qu'il engage ses réformes et nous accomplirons ce rôle. Intervenir, même de bonne foi, est à mon avis un retour en arrière. La réforme doit venir de l'intérieur.


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