On entend dire depuis quelques semaines et même des mois que les familles et les clans du président déchu sont à l'origine de tous les maux que connait la Tunisie. C'est évident, mais le 14 janvier a empêché toutes ces familles mafieuses de céder tout ce qu'elles détenaient ici en Tunisie et d'en percevoir les dividendes à l'étranger, s'ils avaient juste eu le temps pour le faire. Ceci est une hypothèse que pas mal de gens avancent. Mais ce que beaucoup d'autres omettent souvent de dire, c'est que derrière toutes ces familles, il existe des «bras droit» qui leur concoctaient tous leurs crimes et dont le génie servait à piller encore et davantage les ressources déjà modestes de la Tunisie. Et dans tout cela, il semble que d'autres, (et ils sont nombreux et aux méfaits innombrables), ont tant profité du système qui prévalait sans qu'ils ne soient vus, ou même repérés. Cette deuxième catégorie a bien connu les rouages du système qui régnait et a ainsi bien su en profiter, est plus dangereuse que les Trabelsi, et elle court toujours sans même être inquiétée. Retournons juste à quelques semaines auparavant, notamment à la grève d'une bonne partie des agents de la Transtu, la Société de Transport de Tunis. Une grève qui a paralysé le Grand Tunis. Les demandes des grévistes comprenaient, outre certaines questions d'ordre matériel, des réponses à leurs interrogations quant à la situation de leur société, et qui avouons le, est catastrophique, pour ne pas dire qu'elle est au bord de la faillite. Ayant fixé trois semaines de préavis avant de passer à l'action, les grévistes ont vainement tenté de rencontrer le ministre des Transports Salem Miledi, qui lors d'une interview à la télévision nationale a reconnu la situation déficitaire catastrophique de la Transtu, mais a expliqué sa défectuosité par le comportement de beaucoup de voyageurs, notamment la resquille qui cause selon lui « la majorité des pertes de la société ». C'est alors dire qu'une société qui fait travailler 7000 employés, auxquels s'ajoute un millier de nouvelles personnes (grâce à l'abolition de la sous traitance dans le secteur public), et qui assure le voyage de 1,5 million de Tunisiens quotidiennement est en train de connaître la situation de déficit de 500 millions de dinars, à cause de la resquille ! C'est un prétexte qui ne tient pas debout. Combien de resquilleurs allons-nous compter par jour ? 1 million, quotidiennement ? Les « balbutiements » que connait la Transtu ne sont pas causés de la resquille comme l'a mentionné le ministre des Transports. Les raisons sont beaucoup plus profondes que cela! Des nominations à tort et à travers D'après les informations que nous avons pu collecter, le poste de ministre des Transports a été en ballottage entre 5 noms. Une bonne partie des candidats étaient quinquagénaires, ce qui a rendu le choix un peu délicat pour Béji Caïd Essebsi, peu habitué aux jeunes. Et c'est l'UGTT (Union Générale des Travailleurs Tunisiens), qui serait entrée en force pour imposer le nom de Salem Miledi, assurent nos sources. Ce dernier a essayé de calmer un peu les esprits au sein de la Transtu, mais la manœuvre est assez rude. Car d'après les informations dont nous disposons, l'actuel PDG de la Société de Transport de Tunis (Transtu) Fradj Ali serait de loin dépassé par le Chef du département central des ressources humaines et juridiques, qui serait, selon nos sources « l'ancien bras droit de l'ex PDG proche de Ben Ali, l'ancien maire de Radés et député Chedhli Hajri ». D'ailleurs, le poste de PDG de la Transtu a été proposé à pas mal de responsables, mais ils l'ont tous décliné. On en cite Boubaker Mahouachi qui a choisi d'être nommé à la tête de la Société du Transport du Sahel, ou encore un autre gestionnaire (puisque la société est en situation de faillite), suggéré par Mansour Moalla, ancien ministre de l'Economie. On aurait aussi proposé le nom de Abdeljalil R'haiem, ancien Directeur Central Technique Exploitation Réseau Ferré et devenu depuis quelque temps Directeur Général Adjoint, pour occuper le poste de PDG « mais le personnel de la société ne l'aurait pas accepté, surtout qu'il serait connu pour être compétent, mais aussi pour n'être clean », nous assure la même source. Un exemple de sociétés écrans D'après les informations que nous avons aussi pu avoir, Abdeljalil R'haiem « serait soutenu par l'UGTT, et serait contesté par l'ensemble du réseau métro- bus, sauf par un clan restreint au niveau du dépôt du TGM ». Ce même responsable aurait été avec « Chedhli Hajri, Salem Miledi sous la houlette de l'ancien ministre Abderrahim Zouari, impliqué dans les négociations des rames de métro Alstom, connu pour son passé dans les malversations et les pots de vin, mettant fin aux contrats qui liaient le réseau métro à l'entreprise Siemens » ! Tout ceci semble être ordinaire, pour ne pas dire normal. Mais ce qui est étrange c'est que Abeljalil R'haiem crée une société d'import et export au nom de « Afrique Service » juste quelque mois après la signature du contrat avec Alstom. Le 11 février 2006, plus exactement. Cette société, d'un capital de 15 mille dinars, compte parmi ses trois membres créateurs le nom d'une enseignante ; Mme Najla Garbaa, qui n'est autre que l'épouse d'Abdeljalil R'haiem. La société a pour objet « toutes les opérations de prestations de services et d'assistance réalisées au marché local et à l'exportation tant par elle-même que pour appel à sous-traitance dans les domaines techniques et industriels et toutes autres opérations d'importation et d'exportation de matériels électrique et électronique dans le cadre de la commercialisation et de la représentation. La maintenance des engins et leurs pièces de rechange. La création, l'installation, l'acquisition et l'exploitation de toute usine, établissement industriel et commercial. Les travaux d'entreprise d'électricité, d'électronique et électromécanique. Et généralement toutes opérations industrielles, commerciales, financières, civiles, mobilières ou immobilières, pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social ou à tous les objets similaires ou connexes ». Etrange tout cela pour une enseignante, non ? Mais pas du tout étrange dés lors que les opérations de « Afrique Services » répondent parfaitement aux compétences de l'actuel DGA, et surtout aux besoins de maintenance et de pièces de rechange des rames de métro et de l'électrification des lignes de la Transtu ! « Afrique Services » pourrait-elle par ailleurs expliquer que l'un des comptes bancaires de l'actuel DGA de la Transtu serait créditeur de 800 mille dinars ? On ne peut l'affirmer, surtout que nous avons contacté Abdellatif R'him sur son téléphone personnel ainsi que sur son numéro direct, mais, stupéfait, il nous a décroché au nez, nous demandant « où avons-nous eu toutes ces informations ? ». La Transtu semble être la victime d'un laisser aller complice. Non seulement cela, mais la Transtu qui est en train de devenir plutôt l'ombre d'une société, a été, de longues années durant la proie et des Trabelsi et de certains de ses « hauts responsables ». Des responsables qui semblent être la cause directe des dettes colossales dans lesquelles se débat cette société publique qui assure l'un des services vitaux aux Tunisiens. Entretemps, les agents de cette société annoncent les couleurs, et des grèves sont à prévoir juste après l'Aïd. Ce ne serait pas seulement un défi à ces « responsables » nous assurent certains, mais aussi un défit à l'UGTT qui essaye, selon eux, de couvrir les malversations et d'accaparer le droit à l'activité syndicale en Tunisie.