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Le mythe de Sisyphe ?
Eclairage Combat de la femme toujours reconduit et jamais définitivement gagné...
Publié dans Le Temps le 21 - 08 - 2012

Les menaces qui guettent la citoyenneté de la femme sont importantes et bien réelles. C'est pourquoi cette célébration du 13 août a une grande signification.
Défendre les acquis de la femme . C'est dans ce cadre que s'inscrit la soirée débat organisée à Hammamet par Kolna Tounes section d'Hammamet sur la femme tunisienne : réalité et défis

Une lecture de la période allant de l'indépendance en 1956 au 14 janvier 2011 révèle qu'on est passé en Tunisie par deux phases a expliqué Jinane Limam professeur en droit « :Le règne de Bourguiba : 1956 à 1987 a été marqué par « un féminisme d'Etat » mais l'émancipation de la femme était au cœur du projet moderniste incarné par (Bourguiba).La période allant de 1987 jusqu'au 14 janvier 2011 : l'utilisation des acquis de la femme à des fins de propagande politique. Au temps de la dictature, il y avait un féminisme d'Etat, qui consistait à mettre en vitrine le code du statut personnel des femmes pour montrer à quel point le pays était en avance et accordait une vraie place aux Tunisiennes. Mais l'Etat n'allait pas au fond des choses. En plus toutes celles qui ne faisaient pas partie de la mouvance du « féminisme d'Etat », étaient harcelées et réprimées. Ainsi les militantes dans l'opposition (partis politiques) ou dans la société civile (ATFD/LTDH) faisaient l'objet des pressions et différentes formes de harcèlement ; et étaient victimes des atteintes graves à la liberté d'expression et du blackout médiatique. Elles étaient donc victimes de persécution à la même tire que leurs collègues hommes. On constate une non visibilité médiatique des femmes au profit de Leila Ben Ali « seule à occuper la scène médiatique en s'appropriant la question femme en tant que présidente de l'association Basma et présidente de l'Organisation arabe des femmes ». Ainsi lors de la campagne électorale de 2009 (élections présidentielles et élections législatives) sur les 6,94% de l'espace de la presse écrite alloué aux femmes, 0,73% seulement ont été réservés aux candidates et 99,27% à l'épouse du président déchu qui, faisant campagne pour lui, se positionnait en bonne place pour elle sur la scène politique [LTDH, ATFD, CNLT, OLPEC, SNJ, Observation de la couverture des élections législatives et présidentielles, Rapport, 2009, Tunisie, 44 p]

Du militantisme réel au militantisme virtuel

Durant la révolution ajoute Pr Jinane Limam «la femme tunisienne a pu faire l'expérience de la citoyenneté égalitaire, il y a eu en effet une très forte participation des femmes (espace réel/virtuel) : Un militantisme dans l'espace réel joué par les femmes militantes agissant dans le cadre de certaines associations telles la LTDH, l'ATFD ou corps de profession, les avocates par exemple et la présence des femmes était importante dans les manifestations dans les régions (il y a même celles qui y ont laissé leurs vies) et la capitale (fin décembre 2010-14 janvier2011). Parmi les photos marquantes de la révolution et du 14 janvier celles des manifestantes devant le ministère de l'Intérieur. D'après le rapport de la commission nationale d'investigation sur les dépassements et les violations commis lors de la Révolution tunisienne, les dépassements à l'égard des femmes sont de 12 cas de décès été enregistrés. 25 dossiers ont été également transférés à la commission sur le nombre des femmes touchées par balles, ainsi que 100 dossiers portant sur les agressions et d'arrestations. Ce militantisme a touché l'espace virtuel :les réseaux sociaux (fb) durant la même période étaient investis par des jeunes femmes bloggeurs et simples internautes qui se sont distinguées par leur courage en publiant des photos des victimes de la répression policière et en publiant des messages pour la révolte.

Les acquis de la femme, menacés

Dans cette phase transitoire, les droits des femmes font l'objet de plusieurs défis et convoitises. « Il faut être donc attentif et vigilant à toute tentation rétrograde car tout est possible, dans un sens comme dans un autre. Une année après la révolution ajoute Pr Limam , l'ambiance a changé et je sens que le champ du possible (liberté, démocratie, égalité...) se rétrécit d'une manière dramatique de jour en jour. Beaucoup d'indices sont négatifs quant au maintien et pourqu6oi pas le renforcement des acquis de la femme. Parmi lesquels les résultats des élections de l'ANC, élections remportées par le parti islamiste Ennahdha avec 89 sièges sur les 217 et dont le projet constitutionnel n'est pas le meilleur garant d'une égalité homme femme. En effet, le référentiel religieux et islamiste de la mouvance islamiste (application de la Chariaa par exemple) met en exergue la spécificité culturelle et du contexte national pour évincer les standards internationaux des DH et justifier des restrictions en matière des droits humains en général et des droits des femmes en particulier .Les travaux à l'ANC ne font que confirmer ces craintes. Les projets de textes (constitutionnels/législatifs) liberticides sont nombreux. Ce qui est indigne de cette phase supposée être de transition vers la démocratie. Le groupe Ennahdha a pu imposer, lors d'un vote au sein de la commission sur les droits et les libertés, l'article 28 qui est fort controversé à cause de sa formulation équivoque et peu juridique. Il stipule notamment que «l'Etat garantit la protection des droits de la femme, consolide ses acquis, en la considérant comme le véritable partenaire de l'homme dans la construction de la patrie afin qu'il y ait complémentarité des rôles au sein de la famille ».En définissant la femme par rapport à l'homme et au sein d'une famille, en introduisant cette notion de complémentarité entre l'homme et la femme l'intention du parti Ennahdha (dont les membres ont voté en majorité pour cet article) de mettre en péril les acquis de la femme tunisienne est claire. Cette version est inacceptable car elle va en dessous des aspirations égalitaires des tunisiens. La garantie réelle des droits exige une stipulation explicite sur l'interdiction de toute forme de discrimination, l'instauration de l'égalité en droits et obligations entre les hommes et les femmes et le principe de parité pour tous les postes électifs. Il faudra certainement beaucoup de temps, de débats, de manifestations, pour que le statut privilégié de la femme tunisienne se maintienne et pourquoi pas évolue. Ainsi le rôle de la femme égale de l'homme est encore à conquérir.

Un combat institutionnel et social

Emna Mnif Présidente de Kolna Tounes a estimé lors de son intervention intitulée «Femme tunisienne, réalités et défis» que le code du statut personnel, la constitution de 1959 et la législation tunisienne sont jusqu'à l'heure actuelle à l'avant garde du monde arabe. Cependant dit –elle , la conscience de ces avancées réside essentiellement chez les élites intellectuelles et économiques et leur profitent en particulier. Malgré cela, il y a un gap entre ces dispositions légales et la réalité de terrain. Une faible représentativité des femmes dans les responsabilités en particulier politiques y compris dans les gouvernements de transition qui ont suivi la révolution...Il y a une autre réalité qui est celle des catégories sociales défavorisées, inégalités dans les salaires, plus grande proportion de femmes dans les secteurs informels, mal rémunérées, sans couverture sociale, le secteur agricole un secteur d'exploitation des femmes, le poids de la tradition, les violences faites aux femmes sans qu'elles n'aient ni les outils, ni les moyens, ni la possibilité de se rebeller et réclamer leurs droits.

Le combat pour les Droits et les Libertés est un combat des élites et ne peut être gagné que si toutes les catégories sociales s'en saisissent. Or, cela ne peut pas se faire si le combat social n'est pas mené de pair. Deux défis pour résumer ajoute Dr Mnif : un combat institutionnel car le projet de constitution porte les prémices de menaces aux Droits et Libertés de tous les citoyens et en particulier des femmes. La multiplication des articles qui parlent de la femme dans une définition par rapport à l'Autre, conjoint, famille, partenaire... l'utilisation de référant qui manquent de précision, la pénalisation de l'atteinte au «sacré» sans le définir, élever l'article 1er au rang d'article intangible qui affirme «l'Etat Islamique» plutôt que «musulman» sont autant d'approches sournoises pour remettre en cause, au moment voulu, le CSP et d'autres dispositions légales favorables à l'émancipation de la femme et surtout pour empêcher toute avancée en la matière. Deux notions doivent impérativement être clairement énoncées dans la constitution :

L'égalité complète entre les citoyens sans discrimination et la constitutionnalisation du CSP sur la base d'acquis irréversibles. Le deuxième combat est un combat social explique Mme Minf. « La proximité avec les femmes appartenant à des catégories sociales défavorisées et précaires doit être la priorité des démocrates. C'est le champ d'action de la société civile. Nous avons le devoir de les accompagner dans la création de sources de revenu, l'amélioration des conditions de vie, l'accès aux études des filles, notamment rurales...

Il ne suffit pas de sortir manifester sur les grandes artères des grandes villes pour gagner le combat des Droits et des Libertés. Pas plus qu'il ne suffit d'espérer fédérer les partis politiques pour être «sauvé». Le salut ne peut venir que de l'engagement individuel de chacun et de chacune, sur le terrain de la précarité, du dénuement et des injustices. Proximité, proximité, proximité...

Qui tient à la Liberté doit être capable de consentir des sacrifices. Pour vivre libre, il faut être prêt à mourir pour sa Liberté.


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